C’est d’abord pour nous tous un appel profond à la "conversion - metànoia - en regardant l’expérience de l’apôtre" afin de "sortir des sables mouvants de l’orgueil et du péché, du mensonge et de la tristesse, de l’égoïsme et de toute fausse sécurité, pour connaître et vivre la richesse de son amour" (angélus du Saint Père, 25 janvier 2009 –texte qui n’est pas cité dans le livre mais qui en livre l’esprit-).
Conversion qui est la seule et unique voie de l’unité : unité dans l’Eglise, entre les chrétiens, et avec les juifs ; la conversion "indique l’attitude spirituelle adéquate pour pouvoir progresser sur le chemin de la communion." "Certes, je ne suis pas encore arrivé – écrit-il aux Philippiens –, je ne suis pas encore au bout, mais je poursuis ma course pour saisir tout cela, comme j’ai moi-même été saisi par le Christ Jésus" (Ph 3, 12). "Nous, chrétiens, nous n’avons certes pas encore atteint le but de la pleine unité, mais si nous nous laissons continuellement convertir au Seigneur Jésus, nous y arriverons, c’est sûr" (ibid.).
Les premiers textes rassemblés dans cet ouvrage, sur la personne de Saint Paul et son charisme, sont relativement connus –discours d’ouverture de l’Année paulienne etc.-, mais combien valent-ils la peine d’être lus, relus et médités !
Ainsi, par exemple, sur le zèle apostolique de Saint Paul, qui devrait être le notre : Par ses Lettres, nous savons que Paul fut bien plus qu’un habile orateur ; il partageait même avec Moïse et avec Jérémie le manque de talent oratoire. "C’est un corps chétif et sa parole est nulle” (2 Co 10, 10), disaient de lui ses adversaires. Les résultats apostoliques extraordinaires qu’il put obtenir ne sont donc pas à attribuer à une brillante rhétorique ou à des stratégies apologétiques et missionnaires raffinées. Le succès de son apostolat dépend surtout d’une implication personnelle dans l’annonce de l’Evangile avec un dévouement total pour le Christ ; un dévouement qui ne craignit pas les risques, les difficultés et les persécutions : "Ni mort ni vie - écrivait-il aux Romains -, ni anges ni principautés, ni présent ni avenir, ni puissances, ni hauteur ni profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus notre Seigneur" (8, 38-39). Nous pouvons en tirer une leçon plus que jamais importante pour chaque chrétien. L’action de l’Eglise est crédible et efficace uniquement dans la mesure où ceux qui en font partie sont disposés à payer de leur personne leur fidélité au Christ, dans chaque situation. Là où cette disponibilité fait défaut, manque l’argument décisif de la vérité dont dépend l’Eglise elle-même.
"Chers frères et sœurs, comme aux commencements, aujourd’hui aussi le Christ a besoin d’apôtres prêts à se sacrifier eux-mêmes. Il a besoin de témoins et de martyrs comme saint Paul : autrefois violent persécuteur des chrétiens, lorsque sur le chemin de Damas il tomba à terre ébloui par la lumière divine, il passa sans hésitation du côté du Crucifié et il le suivit sans regret. Il vécut et travailla pour le Christ ; pour Lui, il souffrit et il mourut. Combien son exemple est aujourd’hui d’actualité !" (Homélie de Benoît XVI, Premières Vêpres, Solennité de Saints Pierre et Paul, Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, 28 juin 2007 ; citée pp. 15-16).
Le dernier chapitre du livre en revanche est moins connu, certes il beaucoup plus difficile d’accès (le Pape nous livre là ses réflexions de grand théologien), mais il est d’une extraordinaire richesse. Consacré à l’"Unique Alliance", entre juif et chrétien, Benoit XVI nous dévoile le fond de la pensée de saint Paul, apôtre juif des gentils.
Voilà ce qu’il écrit, entre autre, à propos de l’Eucharistie : "Quant à notre quête sur la nature de l’Alliance, là est le point essentiel : la Cène se donne comme conclusion de l’Alliance, autrement dit comme prolongement de l’Alliance du Sinaï qui, loin d’être abolie, est renouvelée. Le renouvellement de l’Alliance qui, depuis les origines, a été un élément essentiel dans la liturgie d’Israël, atteint ici sa forme la plus haute. Cela dit, la Cène serait alors, dans la continuité, un renouvellement de l’Alliance ; en elle, ce qui jusqu’alors s’accomplissait selon les prescriptions rituelles, connait, grâce à la plénitude de la venue de Jésus, une profondeur et une intensité naguère imprévisible. Cela nous permet de comprendre pourquoi les auteurs de la lettre aux Hébreux ou de l’Evangile de Jean (dans la prière sacerdotale de Jésus), outre le lien traditionnellement établi entre la Cène et la Pâque, mettent en étroite relation l’Eucharistie avec le Jour de l’Expiation et voient son institution comme le jour de la réconciliation du cosmos –une idée dont on trouve aussi l’écho dans la lettre de saint Paul aux Romains (3, 24)” (pp. 77-78).