Voilà un livre thérapeutique, propre à nous enlever tous nos complexes de… bons à rien ! Car on apprend que c’est justement ceux que Dieu recrute .
Le premier appelé, Abraham est un vieillard flanqué d’une femme stérile, Moïse un bègue, Pierre un lâche, Matthieu un collabo, Jacques et Jean des ambitieux, Marie-Madeleine une courtisane, Paul un fanatique et bien d’autres recrues qui jalonnent cet ouvrage sont aussi peu glorieuses… Rien en tous cas qui puisse nous impressionner comme idéal indépassable !
Bien au contraire, comme en témoigne le personnage qui illustre la couverture du livre, Zachée, un voleur, à qui pourtant Jésus demande de demeurer chez lui et qui le reçoit aussitôt avec joie, nous dit l’évangile.
Recevoir Jésus avec joie est en fait l’objectif réel de ce livre, qui nous rappelle sans cesse que
c’est Dieu qui nous a aimés le premier, alors que nous n’étions encore capables de rien, comme le dit Saint Paul (Rm 5, 6)
En effet, Dieu ne s’est pas découragé devant notre misère due au péché, car il sait que la pâte humaine qu’il a voulue à l’origine est bonne . Et cette pâte en fusion, Il la reprend inlassablement afin qu’elle atteigne l’éclat qu’Il a toujours voulu lui donner. C’est pourquoi Dieu est plus grand que notre cœur : Il voit, au delà de la chenille, le papillon que nous sommes destinés à devenir.
Cela ne veut pas dire que nous devons attendre passivement une autre vie dans laquelle aurait lieu cette transfiguration. Non, la vie éternelle a déjà commencé ici-bas, et anime tout notre être, y compris notre corps, puisque destiné à la résurrection.
Même si l’harmonie entre corps et âme - ici-bas encore brouillée - ne sera restaurée parfaitement que dans l’au-delà.
Le salut est en effet le fruit d’une longue gestation au cours de laquelle Dieu agit en ce monde, en se servant du mal lui-même pour en faire un plus grand bien.
Déjà nous voyons dans la Bible que même les actes mauvais permis par Dieu peuvent être incorporés à son dessein (exemple de Joseph vendu par ses frères). Le plus grand mal étant évidemment le péché des origines dont Dieu s’est servi pour notre salut. Bienheureuse faute qui nous valut un tel rédempteur…
De même, Dieu se sert de notre misère pour nous faire grandir en sainteté.
Car comme l’écrit un mystique, les plus grands et les plus beaux des arbres - les saints - ne sont pas ceux qui ont le moins péché, mais ceux qui ont su utiliser leur propre misère, les feuilles décomposées et le bois mort de leurs péchés, comme un engrais.
C’est en effet dans l’humus (l’humilité) que le grain tombé en terre doit mourir pour porter du fruit.
Si « Tout est grâce » comme nous le rappelle Sainte Thérèse, cette grâce pour autant n’agit pas comme une baguette magique, elle fait appel à la libre coopération de l’homme, et cette synergie porte le doux nom d’Alliance :
Dieu, qui t’a fait sans toi, ne te sauvera pas sans toi, rappelle Saint Augustin
Après ces considérations, l’auteur nous invite instamment à ne jamais perdre confiance en la bonté infinie de Dieu pour nous, et donc à ne jamais rien céder à l’adversaire qui voudrait nous faire perdre cette confiance, nous décourager en nous renvoyant sans cesse à la figure notre misère de « bon à rien ».
Cependant, il nous met en garde : la vie chrétienne ne consiste pas à gagner des « points ciel » . Le Ciel n’est pas un supermarché où il faudrait présenter sa carte de fidélité à la caisse. Le salut ne s’achète pas : la grâce, c’est gratis.
Car en définitive, comme nous dit Saint Jean de La Croix : « À la fin nous serons jugés sur l’Amour ».