Pascal dont le génie a traversé les âges n’a jamais été aussi actuel qu’à notre époque où les libertins, qu’il poursuivait de sa verve, ne sont plus l’exception mais la règle !
Pire, il ne s’agit même plus de s’opposer à Dieu aujourd’hui mais de l’ignorer tout simplement, en dédaignant toute question métaphysique…
En effet, comme nous le rappelle Pascal « les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés pour se rendre heureux, de n’y point penser ».
Mais sont ils vraiment heureux finalement ? Notre monde dépressif et violent semble prouver le contraire.
C’est pourquoi la lecture de Pascal peut être l’occasion de répondre à cette aspiration de connaître la vérité et le bonheur .
Car « tous les hommes recherchent d’être heureux (…) quelques différents moyens qu’ils y emploient »
Mais avant de répondre à ses aspirations, il faut savoir qui est l’homme
Certes Pascal le définit comme "un roseau pensant…Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant" Mais il reste tourmenté par cette énigme abyssale :
Quelle chimère est ce donc que l’homme ? Quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradiction, quel prodige, juge de toute chose, imbécile ver de terre, dépositaire du vrai, cloaque d’incertitude et d’erreur, gloire et rebut de l’univers !
Qui débrouillera cet embrouillement ?
Comment résoudre en effet cette disproportion insupportable entre la grandeur à laquelle l’homme se sent appelé et la misère de sa condition limitée et fragile
Comment se fait-il [ également ] que nous ayons une idée de bonheur et ne pouvons y arriver , que nous sentions une image de la vérité et nous possédons le mensonge…Tant il est manifeste que nous avons été créé dans un degré de perfection d’où nous sommes malheureusement déchus
La seule réponse possible à « ce grand embrouillement » nous dit Pascal est dans la doctrine chrétienne du péché originel
Sans ce mystère le plus incompréhensible de tous, nous sommes incompréhensibles à nous-mêmes
Et Seul le Christ de l’évangile réconcilie ces contradictions : car c’est seulement par la grâce du salut que l’homme peut retrouver sa dignité perdue.
Par ailleurs Pascal s’interroge sur l’origine de cette nostalgie de cette soif inextinguible qui est au cœur de tout homme :
Qu’est-ce donc que nous crie cette avidité et cette impuissance sinon qu’il y a eu autrefois dans l’homme un véritable bonheur dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide et qu’il essaie inutilement de remplir de tout ce qui l’environne , recherchant le secours qui ne vient pas.
Aucun divertissement terrestre ne peut en effet combler le vide, le manque ontologique de ce roi dépossédé qui se souvient des cieux.
Car ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini, immuable c’est-à-dire que par Dieu même.
C’est bien par la raison humaine qu’on peut aboutir à cette conclusion… Cependant s’il est raisonnable de croire , l’intelligence seule ne peut faire la démonstration rationnelle du Dieu de la Bible dont la connaissance est d’un autre ordre : l’ordre surnaturel, celui du cœur, celui de l’amour qui implique la gratuité.
C’est dans ce sens qu’il faut comprendre cette célèbre maxime
« le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas »
Les deux modes de connaissances se complètent et s’interpénètrent : c’est le fameux
« crois pour comprendre et comprends pour croire »
Ainsi La foi permet d’accéder à des vérités qui dépassent les capacités de la raison, tandis que la raison permet de comprendre des vérités accessibles par la foi
Si Dieu était perceptible par notre seule raison, il perdrait son caractère transcendant et mystérieux …il s’imposerait finalement à tous par son évidence .
Mais Dieu veut demeurer un Dieu caché car il respecte infiniment notre liberté.
Cependant, il y a assez de lumière pour ceux qui ne désirent que de voir et assez d’obscurité pour ceux qui ont une disposition contraire
En tous cas si l’homme ressemble à Dieu par sa raison, c’est par l’amour qu’il le rejoint
En définitive, la religion chrétienne est vénérable et aimable, parce qu’elle n’est pas contraire à la raison, parce qu’elle a bien connu l’homme -grand et misérable- et parce qu’elle promet le vrai bien, c’est-à-dire le bonheur.