Lectures pour le Carême : quand le Christ-médecin vient nous guérir de toutes nos maladies

11 mars 2011

A l’heure où l’on ne parle plus que de bien-être physique et psychique, voyons ce qui est dit sur celui de notre âme. Voici trois ouvrages très différents en contenu, style, volume et prix, mais qui sont tous consacrés à la puissance du péché, qui nous détruit, et plus encore à la force du Christ, qui nous sauve, afin de faire de nous des hommes nouveaux. Chacun à leur façon, ils constituent de beaux encouragements à la conversion et à croire en l’amour de Jésus Christ.

Jean-Claude Larchet, Thérapeutique des maladies spirituelles, une introduction à la tradition ascétique de l’Eglise orthodoxe, Cerf, 2008, 6éme ed., 848 p., 54,10.

« Dieu s’est fait homme afin que l’homme puisse devenir dieu » : la finalité du christianisme est la déification de l’homme. Pour nous sauver le Christ rédempteur s’est fait homme et par sa passion, sa mort et sa résurrection « le Dieu-homme a libéré la nature humaine de la tyrannie du diable et des démons, a détruit le pouvoir du péché, et a vaincu la mort, abolissant ainsi toutes les barrières qui depuis le péché original séparaient l’homme de Dieu et l’empêchaient de s’unir pleinement à Lui » (pp. 7-8). Dieu nous sauve toujours d’une manière totalement gratuite et non comme l’effet nécessaire de nos efforts.

Ceci étant dit, notre salut par le Christ reste un mystère qui ne pourra jamais être adéquatement exprimé. C’est pourquoi l’Écriture et les Pères utilisent des images diverses pour exprimer l’œuvre rédemptrice du Christ : la plus connue en Occident est celle du rachat, mais, celle plus bucolique du Bon Pasteur, a aussi été développée, ou encore celle du guerrier victorieux de la mort, ou enfin celle du Christ-médecin qui vient nous guérir de toutes nos maladies, c’est-à-dire du péché qui nous conduit à la mort. L’image du rachat demeure une approche juridique, elle est aujourd’hui moins parlante à l’homme. L’homme contemporain est plus sensible à une approche thérapeutique : mortellement blessé, il a besoin d’être soigné par le Christ, le Bon Samaritain.

L’ouvrage de ce grand théologien orthodoxe actuel, spécialiste en patrologie, Jean-Claude Larchet, est une véritable somme, dense et très complète. Son profond ancrage dans l’Écriture sainte, la liturgie et la tradition patristique réjouira le lecteur. Ainsi, son livre fourmille-t-il de citations riches et parlantes des Pères de l’Eglise. Les avoir pour conseillers et tuteurs est magnifique mais reste exigeant. Ils nous exposent la vie chrétienne comme un dur combat que nous ne menons pas seuls et dont la victoire nous est assurée en Jésus Christ.

L’auteur présente la vie spirituelle et la guérison que l’homme y trouve, d’une manière méthodique et organisée (ce qui permettra à qui le souhaite de préférer une lecture du livre par chapitre à celle continue), sans vouloir pour autant en faire une technique. L’ascèse bien comprise et bien menée est indispensable pour nous ouvrir à la grâce de la guérison que Dieu dispense généreusement à tous, gratuitement, mais que chacun reçoit à la mesure de ses dispositions intérieures, de son propre abandon.

Peut-être faut-il déjà avoir déjà cheminé pour aborder un tel ouvrage, avoir expérimenté notre profonde faiblesse et donc notre incapacité à nous sauver par nous même. Tout est don de la grâce. Nous ne pouvons adéquatement jeûner, prier et faire l’aumône sur nos propres forces. Pour s’en convaincre il suffira de lire les excellentes pages de l’auteur consacrées à l’amour de l’argent, la colère ou encore la tristesse !
 
Quant à l’orgueil voici un court extrait : "L’orgueilleux, note saint Basile, "fait étalage de ce qu’il a et s’efforce de paraître plus qu’il n’est en réalité". A cette occasion comme en d’autres, il se montre arrogant, infatué et content de soi, plein d’assurance et de confiance en lui-même. A cela s’ajoute souvent la prétention de tout savoir et l’assurance quasi constante d’avoir raison, d’où procèdent la manie de se justifier ainsi que l’esprit de contradiction (également caractéristiques de cette passion), mais aussi la volonté d’enseigner et de commander. L’orgueil rend celui qu’il affecte aveugle à ses propres défauts, lui fait refuser a priori toute critique et haïr tout reproche et toute réprimande, et lui rend intolérable d’être commandé et de devoir se soumettre à qui que ce soit. Cette passion se révèle aussi dans une certaine agressivité : c’est parfois l’ironie qui en est l’expression, mais également l’aigreur dans les réponses aux questions d’autrui, le silence gardé en certaines circonstances, une animosité générale, le désir d’outrager le prochain et la facilité à le faire." (pp. 259-260). Et l’auteur continue !
 
Heureusement à la présentation de chaque pathologie suit celle de son remède, par l’exposé systématique des vertus chrétiennes et surtout l’annonce du Christ médecin : "Ce ne sont pas les gens en bonne santé qui ont besoin de médecin, mais les malades (...) Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs" (Mt 9, 12-13 ; Mc 2, 17 ; Lc 7, 31).
On le voit, ce livre n’est pas seulement le fruit d’une élaboration intellectuelle, il est aussi l’expression d’expériences vécues. Il nous invite à un profond discernement, à une vraie conversion.
 
 
Plus abordable et dans un ton très différent : le livre du Père Gilles Jeanguenin, Guérir des blessures de l’âme, avec saint François de Sales, ed. Emmanuel, 162 p., 2010, 14€.

Gilles Jeanguenin, exorciste du diocèse d’Albenga-Imperia (Italie), s’est spécialisé en démonologie et en psychopathologie clinique. Il est l’auteur de nombreux livres, dont Le Diable existe, Salvator, 2003, Les Anges existent, Salvator, 2005, ou encore sur Saint François de Sales.
Pour lui, comme pour Jean-Claude Larchet, il ne fait aucun doute que ni la psychologie des profondeurs, ni la médecine psychosomatique ne peuvent parvenir à résoudre le mal qui mine l’homme. Car, les principales causes de la souffrance de l’homme ne sont pas à rechercher dans son corps, ni même dans sa psyché, mais plutôt dans son âme : ce sont des maladies spirituelles, en d’autres termes, le péché qui nous ravage. Ainsi, l’auteur revisite-t-il les sept péchés capitaux à l’école de la douceur de saint François de Sales (1567-1622). Il décrit les blessures qu’inflige le péché et donne des moyens pour parvenir à la guérison intérieure.

Cette fois, ce ne sont plus les Pères de l’Eglise, mais Saint François de Sales qui nous sert de guide, grand expert de l’âme humaine. Il nous conduit sur la route de l’amour de Dieu, source de toute vraie guérison. Si saint François est convaincu que la victoire ne peut être obtenue que par Dieu, elle réclame toujours notre collaboration.
Voilà pourquoi chacun de ces trois ouvrages demande une vraie connaissance du péché qui nous habite, de nos blessures, afin que par ce chemin de vérité nous puissions parvenir à la profonde acceptation de ce que nous sommes, de l’autre, pour pouvoir pardonner, nous-même et l’autre, et surtout vivre de l’amour de Dieu.
 
 
Toujours dans la même veine, mais encore plus bref, signalons le dernier petit ouvrage de Christian Poirier qui vient de paraître : Guérison et combat spirituel, Petit traité des pathologies de l’âme, Salvator, 2011, 9,90 € TTC.
Christian Poirier est aveugle, marié et diacre permanent dans le diocèse de Fréjus-Toulon. Son livre se présente aussi comme un petit traité des pathologies de l’âme. Même invitation à connaître notre nature blessée, par un exposé des sept péchés capitaux, pour ensuite trouver des remèdes favorables à notre croissance et à la santé de notre âme. Puis, en s’appuyant sur le meilleur de la nature humaine et en coopérant à l’œuvre de la grâce, l’auteur nous indique la voie qui conduit à devenir des hommes nouveaux. Non pour la recherche égoïste de notre perfection personnelle mais « pour l’amour de Dieu et le salut du monde ».
 
Pour conclure, nous pourrions reprendre cette audience du Saint-Père Benoit XVI : « Vanité des vanités, tout est vanité ! …. Le sage Qohélet repense à toute sa vie et n’y voit que futilité … il invite à discerner quelles sont les vraies valeurs, en quoi il faut mettre son espérance. … Jésus … à la requête de l’homme qui veut le prendre comme juge dans le différend qui l’oppose à son frère, répond : « La vie d’un homme, fût-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses ». Jésus ne condamne pas la richesse en soi, mais invite à se « garder de l’âpreté au gain » ; il dénonce l’opinion selon laquelle le salut se trouve dans les richesses pour soi et non « en vue de Dieu ». Le discernement reste à faire. Il faut discerner ce qui appartient à la terre, pour faire mourir en nous ce qui est le vieil homme, comme le préconise Paul : « Débauche, impureté, passions, désirs mauvais et cet appétit de jouissance qui est un culte rendu aux idoles ». Discerner, c’est reconnaître ce qui est ancien, ce qui nous attache à notre humanité, non pour la nier, mais pour y déceler ce qui doit nous conduire à la vraie vie, à la vie de l’homme nouveau.  » (audience du 5 août 2007).
 
 
Quant au lieu où les acheter, les Avignonais connaissent certainement la librairie Clément VI : c’est mieux qu’internet !
Librairie Clément VI
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