N’oubliez pas d’eux choses, nous avertit l’auteur :
La première : « vous êtes sortis du Néant », la deuxième : « c’est Dieu qui vous en a tirés par amour ».
La première pensée, en nous rappelant notre misère, nous garde de l’illusion d’être déjà arrivés - c’est le péché de présomption ; la deuxième, en nous rappelant l’amour de Dieu, nous garde du péché de désespoir...deux contrefaçons de l’espérance.
L’homme est un pèlerin voyageur ici bas, un être en chemin vers son accomplissement :
de l’image imprimée en nous dès l’origine, vers la ressemblance : « nous serons semblables à Lui car nous Le verrons Tel qu’Il Est ».
Contrairement à ce que prônent les philosophies existentialiste, nihiliste - ou autres philosophies de l’absurde - notre marche n’est donc pas un errement sans but entre l’être et le néant mais un pèlerinage vers notre Patrie Céleste.
L’espérance naît de deux vertus qui sont nécessaires pour accomplir ce pèlerinage : la magnanimité et l’humilité...
alors que nous sommes plutôt enclins au contraire :
l’indolence et l’orgueil.
En effet, on se croit toujours plus que l’on est, mais on espère toujours moins que l’on devrait être.
Le manque de magnanimité nous enlève l’ambition d’être des saints (on n’y arrivera jamais : c’est le désespoir).
Le manque d’humilité nous fait croire qu’on est déjà des saints (« on ira tous au paradis » : c’est la présomption).
Si le désespoir naturel devant l’épreuve est compréhensible et légitime - même s’il peut justement être surpassé par l’espérance...comme le dit Claudel « l’Espérance c’est le désespoir surmonté » -, en revanche, le désespoir surnaturel, lui, est une contradiction en soi, un auto-déchirement : en effet, l’homme nie alors son propre désir, cette soif de bonheur et d’absolu.
Saint Thomas parle de ce désespoir comme d’une résistance opiniâtre et blasphématoire contre la grâce : c’est le fameux péché contre l’esprit.
Le commencement et la racine de ce désespoir est souvent l’acédie : une indolence et une tristesse qui viennent de ce manque de magnanimité, mal si courant à notre époque...
À force de dire « peut-être », à force de suspendre le oui, celui-ci se transforme en non définitif - par orgueil finalement - et c’est alors l’évitement par cynisme ou la fuite éperdue dans les plaisirs .
Or, comme le dit si bien Benoit XVI,
celui qui veut faire de la terre un paradis en fait un enfer parce qu’il demande au temps d’accomplir les promesses d’éternité.
Ce livre est plus que jamais d’actualité pour inciter nos contemporains à retrouver le chemin de l’Espérance, seule réponse à l’illusion d’un bonheur fugace ou à l’angoisse existentielle qui mine notre monde en perte de repère.