Tous les deux sont très différents, tant dans leur approche que dans leur écriture, mais tous les deux nous montrent la beauté de l’Eglise et nous donnent envie de l’aimer, comme le Christ l’a aimée, Elle qui est “une, sainte, catholique et apostolique”. Mystère de l’Eglise à la fois pécheresse et sainte : “je suis noire, mais belle” (Ct. 1, 5), communauté à laquelle nous avons la chance, la joie (disent les auteurs), de devoir l’annonce de notre salut et d’appartenir.
Aimer l’église, retraite du Cardinal Christoph Schönborn prêchée à Jean-Paul II au Vatican en février 1996
Edition Cerf-Saint Augustin, collection Épiphanie, 1998, 192 p., 14.80 €
Une valeur sûre, excellente, d’une très grande profondeur et rigueur théologique, basée sur un commentaire du Catéchisme de l’Eglise Catholique et les grands documents conciliaires. Bref, des pages admirables, qui nous portent très loin et font jaillir en nous la reconnaissance.
L’auteur reprend au long de ces pages toute l’histoire de notre salut, de la Création à la Pentecôte. Eglise image de la Trinité : voulue de toute éternité par Dieu le Père, elle est la communauté de vie avec le Christ : vivre avec Lui, en Lui et pour Lui (CEC, 426) et son âme est l’Esprit Saint. Que serions-nous sans Elle ? A qui irions-nous ? Pèlerine sur la terre, l’auteur n’omet pas pour autant de souligner ses faiblesses… nos faiblesses.
Beaucoup de passages seraient à citer, en voici un parmi tant d’autres : _ “Croire au Créateur, cela signifie aussi croire en la grandeur qu’il réclame de la part de ses créatures. La plus grande crise de l’Eglise me parait résider aujourd’hui en ceci : ne plus oser croire dans le bien que Dieu réalise avec ceux qu’il aime et pour eux (cf. Rm 8, 28). Dans la tradition, les maîtres de vie spirituelle appellent acédie, dégoût spirituel, un tel manque de foi spirituel. C’est "l’œdème de l’âme", dont parle Evagre, qui plonge le monde et sa propre vie dans une morne grisaille privant les choses de leur saveur et de leur éclat. La "tristesse" qui est si répandue aujourd’hui dans l’Eglise provient avant tout de ceci : nous ne répondons plus avec générosité à l’invitation de Dieu et n’acceptons plus de lui servir de collaborateurs avec tout ce que nous sommes et que nous avons (cf. 1 Co 3, 9). Pour une créature, il n’y a pas de plus haute réalisation de soi que de servir ainsi sans réserve" (p. 43).
Plus loin, l’auteur revient sur l’acédie, qui nous menace tous et engendre en nous frustration et agressivité. Il nous livre aussi le principal remède à ce démon : la persévérance, qui est déjà une forme l’espérance” (pp. 132-134).
Aimer l’Eglise, méditations sur la Lettre aux Ephésiens du Père Raniero Cantalamessa
Editions des Béatitudes, 2005, 108 p., 7.50 €
S’il s’agit également d’un livre destiné en premier lieu au siège apostolique, il est plus facile et plus rapide à lire. Prenant comme point de départ une lectio divina de la lettre aux Ephésiens : « Le Christ a aimé l’Eglise : il s’est livré pour elle » (Éph. 5, 25), l’auteur nous incite à contempler magnifiquement l’Eglise à travers les quatre images classiques d’édifice, de corps, d’épouse et de mère.
De bien belles pages seraient à citer, notamment celles sur les Juifs, l’Ancienne Alliance et la question de leur conversion au Christ (pp.17 et svt. ; cf. également sur le Peuple élu les pages admirables du Card. Schönborn, pp. 70 à 78, notamment : « les païens, les peuples, les religions ne peuvent découvrir le Christ et par là devenir l’Eglise qu’en accueillant les promesses faites à Israël, qu’en faisant leur l’histoire d’Israël » -p. 75-).
Très beaux passages également sur le don des sacrements et spécialement sur celui de la réconciliation : « le Christ ne veut rien remettre sans l’Eglise » (pp. 83 et svt.), ou enfin sur la famille, petite Eglise domestique (pp. 91 et svt.).
Ces auteurs nous montrent que l’Église est l’amour de Dieu, manifesté dès les origines, et totalement communiquée en Jésus Christ, et qui suscite chez ses membres la réponse d’amour de l’Épouse à l’Époux : « aimer l’Eglise et se donner soi-même pour elle » (Ep. 6, 15).
Tous deux, bien entendu, reviennent sans cesse à Marie, notre mère.
Le Christ et l’Eglise sont un. A ses juges théologiens, qui voulaient faire dire à Sainte Jeanne d’Arc qu’elle était sans doute fidèle au Christ mais pas à l’Eglise, celle-ci répond merveilleusement : « De Jésus-Christ et de l’Eglise, il m’est avis que c’est tout un, et qu’il n’en faut pas faire difficulté » (cité par Ch. Schönborn, p. 81).
Sainte Catherine de Sienne, Sainte Thérèse d’Avila ont aussi écrit leurs plus belles pages sur l’Eglise.
Et c’est encore une femme, toute jeune, qui a écrit l’un des plus beaux et plus connu commentaire du mystère de l’Église selon Saint Paul :
« Je compris que si l’Eglise avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l’Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d’amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Eglise, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Evangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’amour renfermait toutes les vocations, que l’amour était tout, qu’il embrasait tous les temps et tous les lieux… en un mot, qu’il est éternel ! (…) Oui j’ai trouvé ma place dans l’Eglise et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… dans le Cœur de l’Eglise, ma Mère, je serai l’amour (…) »
(Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, docteur de l’Eglise, méditant les chapitres 12 et 13 de la 1re Ép. aux Cor., Ms B, 2v-3v).